France : Sauvons nos agriculteurs ! | Land Portal

Date : 26 février 2020

Source : Marianne.net

Par: Jean-Marcel Bouguereau

Il fut un temps où le Salon de l’agriculture était une fête : les paysans montaient à la capitale, on échangeait des expériences, on rivalisait dans des concours agricoles…

Le Salon de l’agriculture, qui s’ouvre aujourd’hui à Paris, est devenu le carrefour de l’angoisse. Angoisse face à une profession en voie de disparition : en 1988, il y avait 1,1 million de chefs d’exploitation. 30 ans plus tard, il en reste seulement 448 500, moins de la moitié ! Et d’ici trois ans, le départ en retraite d’un agriculteur sur trois va bouleverser le paysage, départs en retraite qui ne seront pas compensés par la transmission des propriétés, rendue plus difficile par les prix du foncier mais aussi par le caractère de moins en moins attrayant d’un métier très exigeant et peu profitable.

Il y a aussi ces « plans sociaux » dont on ne parle pas : chaque année 1 200 éleveurs bovins quittent le métier. Sans parler de cette épidémie silencieuse, mais plus meurtrière chez nous que le coronavirus : les suicides d’agriculteurs : 605 d’entre eux ont mis fin à leurs jours l’an dernier, près de deux par jour selon la Mutualité sociale agricole. Le suicide est la deuxième cause de décès dans cette profession. Un désespoir qui provient de l’insécurité financière, des dettes et de la pression constante de travailler toujours plus dur pour des salaires de misère. Y a-t-il d’autres professionnels à ne pas pouvoir fixer eux-mêmes les prix de leurs produits, à devoir les vendre au rabais ? À tel point que ces prix peuvent même être inférieurs à leurs coûts de production !

Est-ce un hasard si c’est l’une des rares professions à trouver son compte dans la réforme des retraites puisque jusqu’ici, la moyenne des retraites agricoles est de 763 euros bruts mensuels. Avec l’obtention d’une revalorisation à 85 % du Smic pour les futurs retraités, tous les syndicats soutiennent un amendement étendant la mesure à ceux qui ont déjà cessé leur activité. Le problème de la paysannerie, c’est d’être coincée entre les exigences de production et la dictature des centrales d’achat qui écrasent les prix.

Dans cette course où les besoins de la productivité aboutissent à ces fermes concentrationnaires, comme celle des mille vaches, c’est évidemment la qualité qui est sacrifiée en même temps que le revenu des producteurs et, à terme, la santé des consommateurs.

La Politique Agricole Commune qui, jusqu’ici, a favorisé ce modèle économique devrait être revue dans le cadre du Green Deal européen afin de changer radicalement les systèmes de culture et d’élevage et de s’adapter au dérèglement climatique. Mais nous ne devons pas oublier notre rôle à nous, consommateurs : c’est simple, achetez du produit frais, local et de saison. Refusez les marques, leurs emballages et leurs pubs. Privilégiez les circuits courts, les Amap, qui paient les producteurs plus équitablement sans que ce soit forcément plus cher.

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